Publié par Carine Salvi le vendredi 5 décembre 2008 à 15H58
La jeune entreprise montréalaise Xtranormal pourra-t-elle un jour jouer dans la cour des Google, Facebook et autres jeunes pousses de la Silicon Valley devenues grandes?
En tout cas, c'est ce que croient les fonds de capital de risque qui l'ont financée à hauteur de 14 millions $ pour démarrer ses projets.
Fondée en 2006 et également financée par l'homme d'affaires Richard Szalwinski, qui a aussi démarré Softimage, Xtranormal s'appuie sur le principe qu'on n'est pas obligé de s'appeler Steven Spielberg pour faire un film, mais le pousse encore plus loin: on n'a pas besoin non plus d'avoir une caméra.
Par contre, on doit posséder un ordinateur et imaginer une histoire. Le reste, Xtranormal s'en charge en fournissant les personnages et les décors.
Sur xtranormal.com, il suffit d'écrire les dialogues, de choisir ses personnages et en un tour de main on obtient une courte animation.
«Le but est de faire un film en quelques clics. On sait qu'il y a cependant des compromis à faire, par exemple au niveau de la narration» très saccadée et d'un ton monocorde, raconte le développeur principal, Richard Gratton.
Ça ne semble pas trop déranger les internautes. Déjà, 20 000 membres se sont inscrits sur le site web lancé discrètement en version bêta le 6 octobre dernier.
Un de ces utilisateurs est John Stokes, l'associé principal de Démarrage Montréal qui finance de jeunes entreprises en technologie.
Xtranormal n'a par contre jamais frappé à sa porte parce que sa ronde de financement était déjà terminée lorsque Démarrage Montréal a vu le jour.
Selon l'avis de John Stokes, «Xtranormal a trouvé une façon tout à fait nouvelle et novatrice de raconter une histoire et en plus sa technologie est très bonne».
Xtranormal est aussi derrière Mashface, un autre studio d'animation sur Internet pour monsieur et madame Tout-le-monde. Cette fois, on appose des lèvres qui bougent sur des photos de personnalités connues ou pas. Un peu à la manière des Têtes à Claques.
Pour développer ses idées, Xtranormal a bénéficié de capitaux de risque de la Banque de Développement du Canada, la firme torontoise Brightspark ainsi que de Fair Haven de Boston.
Par contre, au lieu de prendre l'énorme somme recueillie pour développer un seul produit, la compagnie s'est éparpillée dans plusieurs projets pendant que les fonds s'épuisaient.
Il y a deux semaines, elle a dû se rendre à l'évidence et laisser tomber un projet à l'étape de la recherche. Du coup, elle a licencié 37 personnes, soit près de la moitié de ses employés.
«On s'est rendu compte qu'il fallait commencer par faire de l'argent avant de se lancer dans la recherche», explique M. Gratton. Avec la situation économique difficile, il ajoute qu'il aurait été très difficile de trouver du nouveau financement.
D'autres entreprises technologiques en démarrage de Montréal, comme Praized qui a développé un engin de recherche locale, Akoha, un jeu social, ou Standout Jobs, une plateforme de recrutement, n'ont pas réussi à monétiser leur travail, pourtant salué par l'industrie.
«Aucune de ces compagnies n'a encore réussi à prouver qu'elle a un plan d'affaires viable», commente M. Stokes.
Cela ne veut pas dire qu'elles sont vouées à l'échec, rectifie-t-il, seulement qu'elles doivent mettre plus d'énergie sur la commercialisation.
Xtranormal a appris la leçon à la dure. Dorénavant, elle laisse de côté l'Internet et se concentre sur un logiciel d'animation qui comprendra plus d'options que la version gratuite en ligne, comme la possibilité de déplacer les personnages et d'ajouter des dialogues préenregistrés.
La compagnie veut lancer son produit au printemps prochain et le vendre pour moins de 400$ aux institutions scolaires, aux écoles de langue ou aux entreprises qui voudraient rajouter des vidéos dans leurs documents de présentation par exemple.
Le diagnostic du grand patron de Démarrage Montréal est somme toute positif.
Lorsqu'il a fabriqué un petit film sur Xtranormal.com cette semaine pour une présentation, John Stokes aurait été prêt à payer Xtranormal pour que le film dure plus longtemps que les deux minutes réglementaires et qu'il n'affiche pas le logo de Xtranormal à la fin.
«Je crois que Xtranormal arrivera à être rentable», conclut M. Stokes.
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